Itinéraire salé d’un marin d’eau douce ou comment j’en suis venu au voile aviron. (20)

Encore qu’il ait fait beau et qu’la Marie Charlotte soit un bon bateau !

Le temps des régates étant momentanément passé, le Maraudeur Raspoutine était reconverti en bateau de balade en famille à la journée.

Même si l’expérience en Suède avait montré que le bateau pouvait s’y prêter, ce n’était pas idéal. Rechercher une embarcation plus adaptée au programme s’imposait.

L’idée c’était une coque ouverte, assez vaste pour transporter deux adultes, quatre enfants… et un chien !

L’idée de la péniche de débarquement ayant été écartée, le choix s’orienta vers deux modèles que nous avions remarqués au salon nautique de Paris.

Le Seil joli canot voile aviron de type prame norvégienne… déjà la tentation du voile aviron pointait le bout de son nez ou un autre modèle résolument moderne avec néanmoins un look sympa le Cruz de Topper.

Le premier avec sa marotte me rappelait mon Fireball, le second paraissait bien pensé avec son gréement en ketch, ses voiles enfilées sur les mats comme un Laser, simple à mettre en œuvre : pas de gréement dormant, mise à l’eau facile.

Ce fut l’occasion qui fit le larron et décida du choix. Une annonce pour un Cruz à aller chercher dans les Landes à Souston.

Vacances de Noël, nous voilà donc partis pour ramener le bateau. Le propriétaire, pilote d’hélicoptère était un type hyper soigneux, le Cruz était nickel, il ne manquait rien.

Et c’est ainsi que le fier bâtiment baptisé La Marie Charlotte allait faire nos beaux jours pendant quelques années.

Cruz version ketch. Le bateau existe également en version avec un gréement classique avec mât, bôme etc…

Que retenir de ces navigations ?

Des balades sur des lacs, en particulier à Neuvic en Corrèze où nous allions camper. La Bretagne, du côté de Port la Forêt et Concarneau. L’Odet. Sur l’Erdre près de Nantes. En méditerranée à la Grande Motte et au cœur de la Camargue par les canaux par grand vent avec juste l’artimon. Les taureaux nous regardaient passer. Aigues Mortes et un cubi de pinard acheté au passage. A Garabit avec un bivouac de nuit avec mon père et mon frère Olivier pour pêcher le Sandre au petit matin. A la Rochelle dans les Pertuis, au coeur du fier D’ars sur l’ïle de Ré. Sur le Rhône près de chez nous … Bref un vrai jeep de la mer, très sécurisante, très stable. Un chouette petit bateau.

Glacière, capote, bidons étanches… rien ne manque sur ce super petit bateau

Un bateau idéal pour des pique niques (il comportait une glacière intégrée !) Pas un foudre de guerre, ce n’était pas l’objectif.

Avec des copains à Neuvic et il reste encore de la place !

Je saute quelques étapes, nous y reviendrons, mais nous lorsque nous avons posé les valises à La Rochelle, l’idée d’un plus grand bateau s’imposait. La Marie Charlotte est alors partie avec ses nouveaux propriétaires en Bretagne.

Le cirque Pinder en action, la caravane, le bateau et la smala en route pour La Rochelle !
Familial …

A suivre : avant d’arriver à Venexiana 4, il nous faudra partir à la poursuite d’Octobre Rouge et faire connaissance avec l’Increvable

Itinéraire salé d’un marin d’eau douce ou comment j’en suis venu au voile aviron. (19)

Venexiana III

Nous étions de retour en France, à Lyon où les régates avec le Maraudeur Raspoutine se poursuivaient tout au long de l’année.

Mais nous avions toujours notre marina de Port Camargue., le Marau dans notre mouillage faisait un peu riquiqui ! De plus optimisé pour la régate ce n’était pas vraiment un bateau destiné à la croisière… Depuis le balcon de la résidence qui donnait sur la sortie du port, on distinguait à l’extrémité d’une des pannes du port publique la silhouette élégante d’un joli « bateau bleu ». Ce voilier était à vendre…

L’idée d’un « gros » bateau à la mer et d’un « petit » pour le Grand Large et les régates de Lyon faisait son chemin…

Le bateau était ancien mais dans un état correct. J’étais séduit par son look « vintage » qui avait tout de suite attiré mon attention. C’était un Trapper 400 MK 3 des architectes Cuthbertson & Cassian. Un modèle plutôt rare. Il me rappelait, la barre à roue en moins, l’Alpa 950 qui m’avait tant fait rêver.

Trapper 400 MK 3

Et c’est ainsi qu’Amogha, aussitôt rebaptisé Venexiana 3 devint notre nouveau navire amiral.

Il était équipé d’un moteur diesel Arona monocylindre que l’on démarrait avec un décompresseur comme une mobylette et dont le tap tap régulier faisait entendre la musique d’un chalutier poussif.

Venexiana 3 – immatriculée à Rouen

Les aménagements étaient classiques, pas de cabine arrière. Bien que plus long que le Trident mais en raison de ses élancements, il était moins spacieux à l’intérieur. Je ne l’avais pas payé très cher, je disposais d’un anneau de port, il allait être possible de prévoir quelques aménagements. Changer le moteur, un pont en teck… pourquoi pas ?

« le bateau bleu » c’est ainsi que les enfants l’appelait !

En réalité il n’en fut rien. Un an après nous cédions la marina pour acquérir une maison dans la région lyonnaise. N’ayant pu vendre le bateau à Port Camargue, j’avais dû prendre la décision de le rapatrier sur le plan d’eau du Grand Large où il resta quelques mois au mouillage sur un corps mort. Je finis par trouver un acheteur dans la région et son départ du club quelque peu rocambolesque.

Somme toute, un bateau bien équipé

Le nouveau propriétaire qui habitait Valence avait affrété un semi-remorque pour transporter le bateau jusqu’au port de l’Épervière sur le Rhône où il souhaitait le baser. Premier souci, la grue du club qui nous servait à mettre les bateaux à l’eau tomba en panne. Il fallut faire venir en urgence une grue sur camion qui réussit à poser le bateau sur le plateau du semi-remorque. Problème… Les transporteurs de bateaux utilisent des remorques surbaissées pour tenir compte de la hauteur des voiliers avec un lest… ce n’était pas le cas ici et les gabarits routiers étaient dépassés… Le chauffeur maudissait ce fichu rafiot qui allait l’obliger à éviter les ponts … À dire vrai il a dû réussir car je n’ai plus jamais entendu parler de lui ! Quelques années plus tard j’eus l’occasion de visiter le port de l’Épervière. Je ne vis pas le bateau… Le nouveau propriétaire avait surement réussi à réaliser son rêve qui consistait à rallier Tahiti !

Vaste cockpit.

A suivre : encore heureux qu’il ai fait beau et que la Marie Charlotte soit un beau bateau !

Itinéraire salé d’un marin d’eau douce ou comment j’en suis venu au voile aviron. (18)

Le Maraudeur fantôme.

Cela aurait dû être mon deuxième Maraudeur. Les copains de l’AS savaient que je recherchais un « bois » à retaper.

Je reçois un jour un coup de téléphone de Loulou (Louis Blancanneaux) qui m’annoce tout de go:  » y’ a un gars, en Bourgogne, qu’a un Maraudeur en bois, il est prêt à le donner en échange de quelques bouteilles de pinard »…

Fichtre ! L’aubaine ! Contact pris avec le généreux propriétaire, je me munis de quelques flacons et nous voilà partis avec mon fils aîné et avec la remorque vide de Raspoutine à la recherche de ce fameux Maraudeur en bois tant convoité .

Effectivement, au fin fond d’une campagne bourguignonne nous finissons par dénicher l’adresse et là, nous tombons sur une ferme et un gus qui se gratte la tête, « ah ! le Maraudeur oui, on va aller le dégager »…

Le voilà qui met le tracteur en route et qui se dirige vers un de ces terrains vagues qui entourent parfois nos exploitations agricoles. Là, au milieu d’un fouillis indescriptible de bottes de paille pourries, de vieux engins agricoles déglingués, de palettes, on découvre ce qui semble bien être un Maraudeur couché sur le flanc. Ni une, ni deux, le type passe des cordes sous la coque et à l’aide de la fourche du tracteur le voilà qui soulève le bateau et vlan qui le dépose sans ménagement sur notre remorque.

Il commence à faire nuit, on ne voit plus grand-chose et tant bien que mal nous brêlons l’embarcation. Salutations d’usage échangées, nous prenons la direction l’A6 pour reganher la maison.

Bon évidemment vous me direz, c’était une occasion… Enfin, pour une occase, c’était une occase !

Le lendemain matin au grand jour me voici à examiner de près mon acquisition de la veille. De loin pas de doute c’était un Maraudeur mais de près le bateau avait un drôle de profil vrillé.

Et à la lumière l’étendue du désastre apparaît. En fait, ce bateau en bois avait été plastifié par un ancien propriétaire. Le problème, c’est que l’eau s’était infiltrée entre le tissu de verre et le bois et celui-ci avait complètement pourri. Le rafiot était irrémédiablement fichu et irréparable.

La mort dans l’âme je me suis résolu à récupérer ce que je pouvais, un peu d’accastillage, des balcons, le lest, la dérive et le rouf en polyester.

Le reste a fini tronçonné et brûlé dans le jardin.

Depuis, il parait que certains soirs de grand vent, on peut voir la silhouette d’un Maraudeur navigant entre les arbres du jardin…

A suivre, prochain épisode : Venexiana 3…

… mais le chapitre des Maraudeurs n’est pas encore tout a fait terminé, il y en aura bien un troisième !

Itinéraire salé d’un marin d’eau douce ou comment j’en suis venu au voile aviron. (17)

Les croisières en Maraudeur !

Il est bien spécifié que le Maraudeur est un petit voilier bien adapté au camping côtier pour… deux personnes.

N’ayant pas bien lu le mode d’emploi, nous avons évidemment pratiqué ce genre d’exercice à six…

Pas question de dormir à deux adultes et quatre enfants dans un si petit espace mais nous avons pu néanmoins utiliser ce merveilleux bateau pour quelques croisières côtières.

Tout d’abord en Bretagne. Nous nous étions retrouvés à quelques Maraudeurs dans un camping au bout de la presqu’île de Quiberon. Nos bateaux étaient au mouillage à quelques encablures de la plage.

Trois Maraudeurs en maraude dont le fameux 91 de Babar !

Des bords tirés dans la baie puis une plus grande expédition, dans le golfe du Morbihan où nous nous sommes retrouvés chez un ami qui possédait une maison, tout au bout, du côté de Conleau. Le soir après une ripaille très mousticailleuse, je me souviens avoir dormi à mon bord avec un de mes fils tandis que le reste de la famille trouvait un hébergement plus confortable dans le bateau de Loulou (Louis Blancanneaux).

Moussaillons sur Raspoutine

Babar au premier plan se dirige d’un air décidé vers …
Échouage sur la plage
Et le numéro spécial de l’AS, « la bible » garde une trace de cette mémorable expédition !

Le temps des régates en Maraudeur avait pris fin. Gallo était parti pour de nouvelles aventures en deltaplane et nous, après quelques trois ans passés en France, nous prenions la direction d’un autre pays pour le boulot.

Cap au nord, direction Göteborg en Suède. Cette fois le Maraudeur était du voyage ! On avait attelé Raspoutine derrière le « Caramazout » (notre véhicule familial transporteur de troupe, un valeureux Toyota Lite Ace) et en route vers le grand nooord !

Quelque part sur une aire d’autoroute au Danemark
Dans le ferry de la Stena Line entre Frederikshavn au Danemark et Göteborg en Suède

En Scandinavie, l’hiver est long… les jours sont courts, Autrement dit, le bateau est resté quelques mois devant la maison en attendant le printemps.

La Suède est un pays de marin, leurs bateaux sont magnifiques et superbement entretenus. En hiver ils sont tous sortis des ports et abrités à terre dans de petites constructions plus ou moins élaborées mais toujours réalisées avec soin.

Nous avions trouvé un petit port pour amarrer le Maraudeur. Ce fut alors l’occasion de belles balades dans un chouette espace de navigation mais pavé de cailloux partout ! En fait on gardait la carte marine en permanence sur les genoux. Ce qui ne m’a pas empêché, voulant prendre un raccourci et confiant dans mon faible tirant d’eau, de talonner un jour assez rudement. Et les enfants de sortir en criant de la cabine : « on coule ! on coule ! » Heureusement sans dommage !

Des iles et des cailloux partout !

Le séjour en Suède fut le plus court de notre parcours à l’étranger, (pour les détails voir le chapitre « au pays des trolls dans Trece Timpul...).

Un an après notre arrivée nous reprenions la route du retour vers la mère patrie.

A suivre : le Maraudeur fantôme…

Itinéraire salé d’un marin d’eau douce ou comment j’en suis venu au voile aviron. (16)

Les années Maraudeur, le temps des régates.

Question régate, le Fireball avait été frustrant. Trop lourd, pas d’équipier, pas de voiture pour se déplacer, équipement baroque… avaient été les raisons officielles pour justifier les piètres résultats enregistrés. En réalité c’est plutôt mon manque de compétences qui en était la cause…

Avec Ondine dans l’océan indien, ce fut le petit temps et mon ami Peter Darch qui nous avaient conduits au triomphe du Hardy’ trophy…

Cette fois la réussite avec Raspoutine allait être le résultat d’une subtile alchimie.

Si pour l’Etap le rating, c’est à dire le handicap nous desservait, en ce qui concerne le Maraudeur, il en était tout autrement. Il existe plusieurs générations de Maraudeurs aux performances plus ou moins différentes. Conséquence : pour la FFV on comptait deux types de rating : un pour les modèles réputés « performants » : les anciens Maraudeurs en bois et les « Gallois » (du chantier du même nom) et un deuxième pour les autres, ceux sensés être « moins performants », comme le Spair et qui concernait Raspoutine.

National Maraudeur 1995 lac de Pierre Percée dans les Vosges

Et c’est là que résidait l’astuce. En effet, si un Spair avec son mât cylindrique, « le poteau » était effectivement peu « performant » tout changeait si on l’équipait d’un mât à retreint et d’un bon jeu de voile… Alors c’était une tout autre musique ! Pour dire les choses simplement, un Spair bien affûté devenait aussi rapide qu’un bois ou qu’un Gallois ! Résultat des courses : on allait aussi vite et souvent plus vite que les autres bateaux de notre catégorie et à l’arrivée on nous rendait du temps grâce au handicap… L’arme absolue.

Oui, mais tout cela ne suffit pas…

Un bateau c’est avant tout un équipage. C’est là que réside la différence. J’ai eu la chance de rencontrer mon pote, mon poto, mon Gilles. Il a su me fournir le plus beau, le plus efficace des accastillages : l’amitié.

Gallo mon poto…

Gallo, une forte tête de de bourrique mais Bon Dieu qu’est-ce qu’on a pu rigoler… D’abord pour mettre au point le bateau. Je me souviens de la superbe barre qu’il avait confectionnée en ‘lamellé collé », c’était son truc de l’époque. Résultat, la première fois où il a abattu en grand, la barre a plié comme un roseau et le bateau a continué tout droit ! Je suis injuste car Gilles est un super artisan, de tout, ses réalisations sont dignes des grands professionnels. Bon, sauf là…

Avec Gallo on s’est entendu tout de suite. C’est lui qui barrait. Moi j’assurais le reste, les yeux rivés sur les penons qu’il m’avait fait coudre sur mon foc. « Attentif, attentif »… je me souviens de ses mots.

Gilles c’est un tacticien et un stratège hors pair. Le plan d’eau, il a eu vite fait de le lire et la tactique, les vieux renards du Grand Large, ils en pleurent encore, du moins pour ceux qui sont encore vivants…

Ah ! on en a gagné des régates sur le Grand Large ! Pour une raison simple : nous étions premiers en temps réel… et on nous rendait encore du temps au calcul du handicap !

Moisson de coupes remportées avec Raspoutine

Mais avec le Maraudeur j’ai retrouvé une autre composante qui allait prendre de plus en plus d’importance dans mon parcours de marin d’eau douce. Déjà avec le Fireball j’avais adhéré à l’IFF, l’association de propriétaires, mais cela était somme toute resté assez lointain. Avec le Maraudeur il en fut autrement. L’aspro allait me m’ouvrir d’autres horizons et surtout d’autres rencontres.

L’association c’était un bulletin et un rendez-vous annuel : le National Maraudeur.

Les bulletinhs de l’AS Maraudeur

Le National se courait tous les ans à la Pentecôte. Le vainqueur remportait un magnifique trophée la coupe Desestre Cadoux . En réalité, la coupe en or massif d’une très grande valeur ne quittait son coffre que pour être admirée le jour du National. L’histoire de cette mythique coupe est à lire sur le site de l’AS Maraudeur.

la coupe en or massif Desestre Cadoux.

Des nationaux nous en avons couru deux. Dans les Vosges au lac de la Pierre Percée et au lac du Bourdon. Dans les deux cas nous n’avons pas fait beaucoup d’étincelles…

Dans le bulletin numéro 105 de l’AS Maraudeur Daniel Barthelet, dit Babar écrivait « … le déplacement dans l’est nous a permis de fréquenter de nouveaux équipages : le gang des Lyonnais sur un Spair bien accastillé, qui s’était entraîné dans l’hiver dans la brise… décidés et agressifs l’équipe JAMOIS GALLO aurait certainement été mieux classée dans des conditions plus musclées »

Au Bourdon c’était mieux, nous terminons 4ème. (mais le chablis était excellent !)

C’était à chaque fois l’occasion d’un déplacement en famille avec les Gallo, en camping dans des clubs sympas et chaque fois sous la pluie ! Et même si les régates étaient sérieuses, c’était surtout de grands moments de rigolade et de convivialité avec des tas de nouveaux copains. L’association était à l’époque dirigée par un super mec, Louis Blancanneaux, Loulou, complètement frappadingue et régatier hors pair !

Régate au Grand Large à Lyon

Le temps des régates en Maraudeur comme les roses n’a duré qu’un temps… Gallo s’est piqué d’une passion pour le deltaplane qui l’a éloigné des plans d’eau et nous, nous sommes repartis vers un autre pays… mais nous le verrons avec le Maraudeur !

A suivre : croisières au long court en Maraudeur !