2 – Cette fois, j’embarque !
Plus les années s’écoulaient et plus les bateaux occupaient mes pensées et mes jeux.
Certes, le train électrique constituait toujours un grand must. Mon réseau s’étoffait au fil des piqûres que je recevais pour soigner mon asthme suivant l’équation ou plutôt l’égalité : une piqûre = un wagon. J’avais vite pigé le truc, un peu plus de couinements et on passait d’un simple tombereau de marchandise à une voiture de voyageurs à boggies de type forestier de deuxième classe. Une année où l’on m’avait confié à mes grands-parents, il avait fallu le renfort d’une escouade de six bonnes sœurs pour me piquouser… avec à la clef une BB 16009.
Pourtant mon souhait le plus cher était de posséder un vrai bateau dans lequel je puisse monter. Certes, il nous arrivait quelquefois pendant les vacances d’embarquer sur un « promène couillons » mais c’était rare parce que ma mère avait mal au cœur.
Compte tenu du niveau en natation de la famille, mes parents étaient réticents pour m’offrir ne serait-ce qu’un de ces jouets de plage gonflable. Toutefois ma propension à soustraire un matelas pneumatique de notre matériel de camping pour le transformer en pirogue de haute mer finit par faire sauter le verrou et enfin :
Ça y était ! J’intégrais le cercle très huppé des capitaines au long court.
Mon père avait même fabriqué une superbe pagaie qui m’autorisait des évolutions hardies, par temps calme et dans des zones à faible profondeur.
Le paternel veillait sur mes navigations en prenant bien soin de rester avec de l’eau à mi-mollet, voir jusqu’aux genoux mais pas plus. Je me souviens qu’au début, un bout, enfin une ficelle qu’il attachait autour de ma taille me maintenait en laisse pour le cas ou une risée ou une vague facétieuse m’eût entraîné vers le grand large.
Qu’importe, cette fois « j’étais monté dedans », je possédais mon bateau !